Port-au-Prince, décembre 2022

Introduction

Regroupement Éducation pour toutes et pour tous (REPT) de concert avec la Coalition latino-américaine pour le droit à l’éducation (CLADE), a mené une étude sur deux écoles situées dans deux sections communales de deux départements géographiques du pays : l’École nationale Wóch Lakou à Saint-Michel (département de l’Artibonite) et l’École Nationale de bassin, à Plaisance (Département du Nord). Cette étude a été menée conjointement dans deux autres pays : Le Nicaragua et le Honduras. L’objectif est prévenir la violence sexiste et sexuelle dans le système scolaire de chaque pays. Dans ce sens des rencontres de travail nationales et internationales ont été organisées régulièrement entre des chercheurs (res), des techniciennes et techniciens de divers pays : Haïti, Honduras, Nicaragua, Brésil, Équateur, Colombie, Canada entre autres.

Les résultats obtenus de cette recherche au niveau des trois pays indiquent que des jeunes filles sont victimes d’attouchements sexuels, d’intimidations et de grossesses en termes de violence sexuelle. Malgré l’interdiction du fouet dans les écoles, des élèves continuent de subir cette violence en Haïti. Les moqueries (buyling) font aussi partie du lot. Certains élèves vivent le buyling en raison d’un handicap, d’un manque d’hygiène ou d’un vêtement mal entretenu. Dans les établissements scolaires, les élèves ne sont pas en sécurité.  Cette situation frappe davantage les jeunes filles quand les toilettes sont fréquentées à la fois par les jeunes filles et les jeunes garçons en même temps. Certains établissements sont mal entretenus. Murs fissurés, toiture béante, cour de l’école sans barrière constituent des indices d’insécurité outre l’absence d’eau,  et d’accessoires pour les toilettes.

Un des points forts de cette étude est la représentation des élèves, des professeurs et des parents de ce qu’un homme ou une femme. Pour appréhender cette dimension, nous avons inclus la perspective de genre dans nos outils de recherche. Presque toutes personnes enquêtées croient que l’homme représente le sexe fort, celui qui dirige la famille. Il est considéré comme étant le chef de la famille. Quant à la femme, elle est plutôt comme une personne devant avoir le sens de responsabilité vis-à-vis de sa famille  notamment de son mari pour répondre aux attentes de celui-ci. Cette synthèse est divisée en deux parties. Dans la première, nous faisons la synthèse des principaux résultats obtenus au cours de l’enquête qualitative tandis que la deuxième porte spécifiquement sur les résultats de l’étude quantitative et les principales recommadations.

PREMIÈRE PARTIE : SYNTHÈSE DES RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE QUALITATIVE

Phase exploratoire qualitative de l’étude

Du 31 janvier au 4 février de l’année en cours 2022, l’équipe d’Haïti s’est rendu sur le terrain respectivement dans les communes de Saint-Michel et de Plaisance afin de réaliser la collecte de données. Les catégories de personnes enquêtées sont les suivantes : 

  • Des membres de la communauté où se trouvent les écoles, 
  • Des directeurs d’écoles, 
  • Des membres d’organisation, 
  • Des parents et des professeurs

Méthodologie 

La méthodologie utilisée pour la collecte est ainsi constituée : 

Observation de terrain, spécialement l’observation de l’environnement des écoles, des conditions d’apprentissage et de travail

  • Des entretiens semi-structurés avec des directeurs d’école, des professeurs, des membres d’organisation
  • Des focus group rassemblant des membres de la communauté
  • Captage et traitement de données : enregistrement des entretiens, transcription, , condensation verticale, condensation horizontale, condensation propositionnelle (Miles et Huberman 2003)

Nos observations : deux écoles ont été visitées, les routes menant aux établissements scolaires

  • Conditions d’apprentissage et de travail à l’école Wóch Lakou : l’école construite en béton avec toiture en tôle ondulée. Les Salles sont spacieuses mais impropres, des murs fissurés, des bancs écrasés pour la plupart. Aucune infrastructure sportive. L’établissement n’est pas clôturé, donc non sécurisé. Il y a souvent des perturbations, des scènes de violence récurrentes sur la cour de l’école. Les filles en sont le plus victimes. Il n’y a que des toilettes sèches. Aucune indication de toilette pour fille et pour garçon. Les filles peuvent faire l’objet de harcèlement dans les toilettes. Il n’y pas de bibliothèque. On n’y trouve même pas d’électricité. 
  • École nationale de Bassin : Meilleur état que l’école précédente. École construite en béton avec toiture en tôle ondulée. La toiture est trouée par endroit. Quand il pleut, professeurs et élèves peuvent se mouiller. Salles spacieuses pouvant contenir une quarantaine d’élèves,. On y trouve un terrain de foot en gazon naturel, sans filet, sans tracé. Établissement non clôturé, donc non sécurisé. Les toilettes ne sont pas curées. Aucune indication de toilette pour fille et pour garçon. 

 Par rapport à la sécurité sur les routes menant à l’école : les cas de harcèlement sont possibles. Pas de service de transport des élèves. Quand il pleut, profs et élèves ne peuvent se présenter à l’école. Après les cours, ça n’arrive pas souvent, mais certaines filles se font harceler en chemin pour se rendre chez elles. Des bagarres ont lieu aussi sur les routes menant à la maison. Ce sont les filles qui en sont les plus victimes. 

Représentation de la violence des enquêtés

Quatre tendances se dégagent des entretiens concernant la violence.  La majorité des personnes interviewées, soit des parents, des professeurs, des membres de la communauté, des responsables d’organisation, notamment des organisations féministes voient la violence comme :

  1. Tout ce que l’on force une personne à faire contre sa volonté, contre son gré
  2. Violence physique, violence verbale, violence psychologique, violence sexuelle
  3. Refus de l’état d’offrir des services à la population, absence d’eau, d’électricité de  nourriture pour les élèves dans les cantines, le détournement des produits alimentaires destinés aux élèves, 
  4. Absence de sécurité pour les élèves et usage du fouet dans les écoles

La violence dans les écoles

Sur l’usage du fouet : à l’école Roche dans la cour (Wòch nan Lakou), toutes les catégories de personnes interviewées sont pour l’usage du fouet. L’apprentissage est impossible sans le fouet, disent-ils. C’est tout à fait le contraire à Plaisance (école nationale de bassin). Les professeurs utilisent d’autres formes de punition :  copier des lignes, mettre l’élève a genoux, renvoyer l’élèves à la maison pour se faire accompagner de ses parents.

Sur les bagarres à l’école : selon toutes les personnes interviewées, soit à Saint-Michel, soit à Plaisance, il y a souvent des bagarres entre les élèves dans les deux écoles. Ce qui est à la base de cela.

Sur le buyling (pseudonymes moqueurs) Un parent a dit ce ceci :

 « Il y a eu des cas de brimades à l’école, liés aux cheveux et aux habits des élèves (« tèt pa byen penyen, inifòm pa byen repase »).  Les deux sexes se sont impliqués dans ces pratiques. Il existe une pratique où des intrus veulent perturber le bon fonctionnement de l’institution soit avec des radios, quand ils sont observés par des directeurs, professeurs et élèves, ils profèrent des injures et des menaces envers eux. Les parents ne sont pas concernés dans ces actions ». 

La cause de la violence en référence au buyling peut être : 

1. une déficience (un handicap chez un élève)

2.  la coiffure mal faite ou des vêtements no repassés. Des bagarres sont plus répétitives chez les garçons que chez les filles. Mais dans des bagarres entre filles et garçons, ce sont les filles qui en sortent victimes le plus. Selon une enseignante interviewée : « Les agressions sont différentes, car les filles sont moins agressives que les garçons qui, eux, aiment se bagarrer. Les cas d’intimidation sont nombreux, les garçons s’en prendre aux autres, il y avait un petit garçon qui avait des oreilles qui dépassent les autres, on l’embêtait pour cela. Les bagarres des garçons sont plus agitées que celles des filles, ce sont les filles qui sont les plus souvent victime car elles ont bien moins de force que les garçons ». 

Violence sexuelle à l’école. 

Les interviewés font référence surtout aux cas de grossesse chez les élèves. Les grossesses d’adolescentes sont plus répétées à l’école nationale « Roche Lakou » qu’à Plaisance. Selon le directeur de l’école nationale de Saint-Michel, il y a en moyenne 5 cas de grossesse adolescente dans son école chaque année. Les élèves tombent enceinte pour des adultes ou des jeunes hors de l’école. En général, cela commence en 5ème année puisque les filles entrent à l’école tard

Leur représentation de ce que c’est un garçon :

Les avis sont différents sur ce que c’est un garçon ou une fille idéale dans leur imaginaire.

Un parent de sexe féminin affirme ceci : « Être un bon garçon, c’est quand ce dernier peut prendre dans l’ensemble les responsabilités de son foyer. [C’est également] quand il est le chef du foyer (« Gason total ») bien que des fois il entraine la souffrance sentimentale de la femme. 

Parallèlement, un mauvais garçon est un garçon paresseux (« Gason manfouben ») peu soucieux de ses responsabilités »

Un homme a dit ceci concernant une femme : La fille est généralement plus faible physiquement que le garçon. Car, les garçons sont généralement les principaux auteurs de ces actes. Certaines fois, les bagarres entre les élèves ont des origines familiales. L’homme est généralement le chef de la maison. La femme en est une petite cheffe aussi en s’occupant aux tâches domestiques. L’homme doit assumer ses responsabilités envers sa famille et ses enfants (se lever tôt.., apporter de la nourriture et payer les frais de scolarité).

Mais certaines militantes d’organisations féministes pensent différemment : « Les femmes et les hommes se différencient en fonction de la partie biologique et de la force physique. Bien que la place des femmes fût réservée à la maison, par rapport à l’évolution, aux contributions des organisations, elles occupent beaucoup d’autres fonctions dans la société. Car, les femmes sont davantage devenues cheffes de famille. La perception des hommes commence par être également modifiée, car ils disent vouloir une femme qui exerce une activité. Être un bon garçon veut dire que ce dernier peut assumer ses responsabilités.

Perspective de genre : certaines des personnes interviewées ne savaient même pas ce que cela signifie, la perspective de genre. Dans les deux écoles nationales, il n’y a pas de matériel de prévention de la violence, encore moins de la violence basée sur le genre. Un professeur affirme ceci : L’école ne dispose pas d’un code disciplinaire pouvant prévenir les actes de violence. Par contre, les professeurs peuvent toujours prodiguer de conseil aux élèves sur le sujet. Je n’ai pas suivi de formation sur la perspective de genre et sur les violences sexuelles avec le Ministère [de l’Éducation]. Mais, je l’ai suivi grâce à d’autres organisations. Les professeurs sont incomplets à l’école. Il en manque quatre (4). 

La directrice de l’école nationale de Bassin va dans le même sens : « L’établissement ne dispose pas d’un programme axé sur la perspective de genre, néanmoins les professeurs, en entamant le chapitre d’un livre lié aux droits humains, peuvent informer les élèves sur les rapports entre les femmes et les hommes.  J’ai suivi de la formation sur la perspective de genre dans le cadre de ma formation à l’école normale, non pas avec le Ministère. L’école peut participer à la construction de la féminité et de la masculinité en donnant aux filles et aux garçons  une éducation capable de former leur caractère afin de devenir des citoyens responsables envers la société. À l’école, les garçons et les filles doivent se comporter en élèves. 

DEUXIÈEME PARTIE

SYMTHÈSE DE L’ENQUÊTE QUANTITATIVE

 

En Haïti, notamment en milieu scolaire rural, les enfants sont exposés à toutes sortes de violence. Mais ils ne la subissent pas de la même manière selon qu’ils soient des filles ou des garçons. Châtiment corporel, moqueries (buyling), grossesse, attouchements, discriminations sont entre autres quelques manifestations de la violence en milieu scolaire, particulièrement en milieu scolaire rural. Haïti n’est pas exempt de ce phénomène qui se produit également dans d’autres pays de l’Amérique Latine.  C’est dans cette perspective que le Regroupement d’éducation pour tous et pour toutes (REPT) s’est associé avec la Campagne latino-américaine pour le droit à l’éducation (CLADE) afin de mener une enquête exploratoire sur ce phénomène dans deux écoles rurales,  dont une dans la commune de Saint-Michel (département de l’Artibonite), et une dans la commune de Plaisance (département du Nord). L’objectif de cette exploration est de comprendre les manifestations de la violence en milieu scolaire rural Haïtien ; d’analyser ses mécanismes de production et de reproduction des établissements scolaires. Pour y parvenir, nous avons fait le choix de deux écoles: École nationale de Bassin (Plaisance) et École nationale Wòch Lakou (Saint-Michel). Ces deux écoles sont fréquentées par des enfants issus de familles à faible revenu vivant en périphéries des bourgs de ces deux communes. L’étude a été réalisée pendant la période des vacances estivales. Pour participer à l’enquête, les enfants ont fait le déplacement de chez eux aux établissements scolaires afin de remplir les formulaires. 

Ce rapport se divise en trois parties. La première est consacrée à la présentation des caractéristiques des élèves enquêtés. La deuxième traite de la violence dans les écoles, en prenant en compte toutes ses manifestations. Quant à la troisième, elle prolonge l’analyse de la violence dans les écoles avec un accent particulier mis sur les représentations des enquêtés de cette violence et des stéréotypes sur la grossesse, l’école et le genre.

 

 

Méthodologie

Pour réaliser cette étude exploratoire, un questionnaire en ligne été conçu pour être administré aux enquêtés (es) via internet à travers le logiciel Monkey Survey. Écrit en espagnol, ce questionnaire a été traduit en créole par l’équipe d’Haïti, mis en discussion avant de l’utiliser comme outil de collecte d’information. Nous avons imprimé une centaine de questionnaires. Mais seulement 89 ont été remplis.

Les enquêtés, ne possédant pas de téléphone intelligent, ont été invités à se présenter dans leurs établissements scolaires respectifs pour remplir les questionnaires. Certains critères ont été retenus pour choisir les participants. Premièrement, les enquêtés doivent être des élèves régulièrement inscrits à l’école ; deuxièmement, ils doivent se situer dans la tranche d’âge de13 à 17 ans ; troisièmement, l’enquêté doit être au moins en quatrième année du fondamental.

L’enquête s’est déroulée en deux phases. Une phase pilote qui nous a permis de faire quelques corrections dans la formulation des questions et de cibler les types d’élèves habilités à remplir le formulaire. La deuxième qui est la phase finale où les élèves choisis étaient différents de ceux de la première phase.

La violence à l’école

La violence à l’école se manifeste sous plusieurs formes telles que des coups de poing, des coups de pieds, des bagarres, des jurons, des attaques sur internet ou les réseaux sociaux entre autres.  Mais en parlant de violence associée à l’école, il faut bien faire la différence entre la violence de l’école et la violence à l’école. Le premier thème concerne entre autres les conséquences d’un établissement scolaire sur ceux et celles qui le fréquentent. Absence d’eau et d’hygiène, des toilettes inconfortables, des murs fissurés, des toits usés laissant couler l’eau de pluie sur élèves et professeurs constituent quelques caractéristiques de la violence de l’école. Tandis que la violence à l’école concerne toutes les formes de punition infligées aux élèves. La différence est que si la violence de l’école n’épargne ni professeur ni personnel administratif, la violence à l’école cible particulièrement les élèves. Mais il y a l’école et la violence. Par exemple, en Haïti, selon l’UNICEF, «en Haïti, 500 000 enfants ont perdu l’accès à l’éducation en raison de la violence liée aux gangs. Près de 1 700 écoles sont actuellement fermées dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince alors que des affrontements entre gangs rivaux ont éclaté depuis fin avril[1] ». il y a quand même un lien entre trois types de violence qu’il faut rechercher. Dans ce chapitre, nous présentons différentes manifestations de la violence dans les deux établissements scolaires ayant fait l’objet de cette étude. Les bagarres à l’école, le buyling, le rejet, la discrimination et le châtiment corporel sont quelques formes de violence analysées dans ce chapitre.

Violence sexuelle, grossesses et stéréotypes à l’école

La violence sexuelle ou violence à caractère sexuel « s’entend de tout acte sexuel ou mettant en cause la sexualité, l’identité sexuelle ou l’expression de l’identité sexuelle d’une personne, qu’il soit de nature physique ou psychologique, qui est commis, qu’on menace de commettre ou qui est tenté contre une personne sans son consentement, y compris l’agression sexuelle, le harcèlement sexuel, le harcèlement criminel, l’attentat à la pudeur, le voyeurisme, le retrait furtif du préservatif et l’exploitation sexuelle. À des fins de précision, mentionnons que l’agression sexuelle englobe le viol[2] ». À côté de la définition de l’université d’Ottawa, l’université McGill définit la violence sexuelle comme « La violence sexuelle est un terme générique qui désigne un continuum d’actes psychologiques ou physiques de nature sexuelle qui sont menacés, tentés ou commis à l’encontre d’une personne sans son consentement. Elle peut être dirigée vers l’orientation sexuelle, l’expression sexuelle ou de genre ou l’identité de genre d’une personne. Cela inclut les blagues sexistes, homophobes et/ou transphobes, la contrainte, le harcèlement criminel, le voyeurisme, la cyber violence, le harcèlement sexuel, la violence interpersonnelle (ou violence intime) et l’agression sexuelle[3] ». Dans sa définition McGill fait le lien entre la violence sexuelle et des formes croisées d’oppression et de discrimination. Le sexisme, le racisme, l’homophobie, la transphobie, le capacitisme sont des facteurs qui peuvent influencer sur la violence sexuelle. 

La violence sexuelle peut être associée aussi aux stéréotypes sexuels ou bien au stéréotype lié au genre défini « comme une opinion généralisée ou un préjugé quant aux attributs ou caractéristiques que les femmes et les hommes possèdent ou doivent posséder et aux rôles qu’ils jouent ou doivent jouer.Un stéréotype lié au genre devient néfaste dès lors qu’il limite la capacité des femmes et des hommes de développer leurs compétences personnelles, d’exercer un métier et de prendre des décisions concernant leur vie[4] ».

Principales recommandations

Les enfants ont le droit à l’éducation et à la protection. La protection de l’enfance implique des « mesures et des structures qui permettent de prévenir la maltraitance, la négligence, l’exploitation et la violence sur les enfants et de prendre en charge les victimes » (Save the Children). Les élèves doivent être exempts de toutes formes de violence au sein des établissements scolaires. Utiliser le châtiment corporel à l’école contribue à l’acceptation de la violence dans notre société et constitue un facteur de risque pour un grand nombre de problèmes à long terme non seulement pour les enfants, mais aussi pour la société. Le droit de discipline reconnu aux éducateurs à l’égard des enfants n’admet plus explicitement ce droit de correction physique, même modéré et raisonnable. Cependant, les résultats de cette étude montrent qu’en dépit de l’interdiction de recourir à des punitions violentes et humiliantes, certaines écoles utilisent encore des châtiments corporels contre leurs élèves.  Pour le REPT, l’emploi de la punition physique, en tant qu’outil pour discipliner les élèves et pour contrôler leur comportement, n’aide pas et peut potentiellement nuire à leur développement physique et psychique. Nous prônons des approches alternatives respectueuses des droits de l’enfant. Nous prônons une éducation dénuée de stéréotypes. 

L’enfant doit se sentir en sécurité auprès de ses éducateurs. Mais les résultats de ce travail montrent qu’on ne peut pas parler de l’école en tant que communauté saine, où les élèves se sentent acceptés et protégés. Les éducateurs participent eux-mêmes à la violence envers les enfants, violant ainsi leur droit à l’intégrité physique, psychologique, à la dignité ainsi que leur droit à la sûreté. On n’a pas la prétention d’interpréter le silence des enfants sur le cas de violence sexuelle. Cependant on sait que les victimes de viol ont tendance à refouler leur sentiment par peur de représailles, surtout si l’auteur de violence est une personne ayant autorité sur la victime. Et pour la même raison les témoins ont eux aussi ce même comportement quand l’auteur de violence est une personne investie d’autorité.  

Cette enquête révèle aussi que les enfants intègrent très tôt dans leur imaginaire l’idée selon laquelle le corps des femmes ne leur appartient pas ; que la femme est une chose qui peut être vendue au plus offrant. Le fait que des enfants croient que l’on peut vendre sa fille pour se débarrasser de ses dettes, ou encore la marier pour obtenir un intérêt quelconque montre que les campagnes de sensibilisation autour des droits des femmes et des filles doivent se poursuivre et les enfants, particulièrement les filles doivent être sensibilisées sur cette question.  

Enfin, outre la question de la violence, il est ressorti que le niveau de l’éducation en milieu rural laisse à désirer, que l’inspection scolaire est absente, que la sécurité n’est pas garantie tant sur le chemin qu’à l’intérieur de l’école. En témoigne l’état des infrastructures scolaires.

Pour une école dénuée de stéréotypes et de violence, une école capable d’accompagner l’enfant dans le processus d’acquisition et d’amélioration de ses compétences, de ses connaissances et de sa confiance en elle, nous recommandons :

  • Une expérience scolaire positive où les enseignants soutiennent les enfants.

L’école doit favoriser la croissance et le développement de l’enfant, indépendamment de son sexe. Les enseignants doivent valoriser leurs élèves et renforcer leur estime de soi. 

  • L’application des dispositions sur les mauvais traitements physiques prises par le MENFP
  • La mise en place par les directions de ses écoles d’un comité de parents qui pourrait réfléchir et travailler de concert avec la direction sur des punitions alternatives en lieu et place du châtiment corporel.  
  • La rédaction et la mise en œuvre par la direction et le comité de parents d’un code de conduite pour régir les rapports entre la direction et les élèves, entre les professeurs et les élèves, entre les élèves et leurs camarades. 
  • La mise en place d’un mécanisme de plainte par les structures centrales ou départementales chargées de la gestion du système.

Il est du devoir de tous ceux et de toutes celles qui interviennent auprès des enfants et de tous ceux et toutes celles qui seraient informés d’un cas d’abus commis sur un enfant dans le milieu scolaire par un membre du personnel enseignant de le signaler auprès des autorités compétentes. La communauté, dans son ensemble, doit être sensibilisée sur la question de la protection de l’enfant, connaitre l’existence de cet outil de protection afin de pouvoir participer dans l’identification des enfants vulnérables. 

  • Augmenter l’offre scolaire afin de réduire la distance parcourue par les élèves et diminuer le risque d’exposition à la violence sur le chemin de l’école.

[1] UNICEF (2022). « Haïti : la violence des gangs pousse un demi-million d’enfants hors de l’école à Port-au-Prince »

[2] Université d’Ottawa. Violence sexuelle, texte disponible sur le site https://www.uottawa.ca/violence-sexuelle-soutien-et-prevention/definitionsconsulté le 141022

[3] McGil University. Bureau d’intervention, de prévention et d’éducation en matière de violence sexuelle. « la violence sexuelle » texte disponible sur le site : https://www.mcgill.ca/osvrse/fr/la-violence-sexuelle consulté le 151022

[4] Haut-commissariat pour les droits de l’homme (HCHDH). « stéréotypes liés au genre. Le HCHDH, les droits des femmes et l’égalité des genres », texte disponible sur le site : https://www.ohchr.org/fr/women/gender-stereotyping consulté le 151022

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